[NEWSLETTERS.ARTIPS.FR, 20 juin 2025] Où l’on rencontre des marchands qui en voient de toutes les couleurs. 1263, Strasbourg. Les marchands de colorant rouge, qu’on obtient notamment à partir de la garance, sont plutôt verts de jalousie : la star du moment, c’est la couleur bleue ! Sa popularité ne fait que grimper, mettant à mal leurs affaires.
Ils ont alors une idée… Ils demandent à un artisan de réaliser un vitrail racontant l’histoire du moine Théophile qui, selon la légende, aurait pactisé avec le diable. Et pour discréditer le bleu, les marchands demandent au maître verrier d’attribuer cette couleur au démon. Malin !
En soi, un siècle et demi auparavant, ce choix n’aurait choqué personne. Le bleu était alors le parent pauvre des couleurs : il était peu utilisé et avait une connotation péjorative. Une aversion de longue date puisqu’elle remonte à l’Antiquité gréco-romaine, époque durant laquelle la couleur était mal définie. L’origine germanique du mot ‘bleu’ en est d’ailleurs un indice, le latin n’ayant pas réellement de terme pour cette teinte.

Mais alors, pourquoi tout cela change-t-il au XIIe siècle ? Pour des raisons théologiques, on commence à distinguer la lumière terrestre de la lumière divine. Or, comme la lumière terrestre est déjà représentée par le blanc, il faut bien choisir autre chose pour le divin, et c’est le bleu qui l’emporte ! Peu à peu, les artistes représentent des ciels bleus, puis cette couleur devient associée à la Vierge Marie et finit par inonder les vitraux, les enluminures, ou encore les émaux.
On comprend que cela ait causé du tracas à nos marchands de garance… Malheureusement pour eux, si ce joli vitrail a effectivement été réalisé, il n’aura pas permis d’enterrer la mode du bleu. Celle-ci perdure même jusqu’aujourd’hui puisqu’il s’agit de la couleur préférée des Français ! Sur l’œuvre ci-dessous, on voit le bleu du ciel divin et le blanc du ciel terrestre :

Le ciel n’est bleu que par convention, mais rouge en réalité. [Alberto Giacometti]
Cora Hopkins
[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : partage, édition, correction et iconographie | sources : newsletters.artips.fr | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, © BnF ; © Musée de l’Œuvre Notre-Dame, Strasbourg ; © Musée Condé, Chantilly.
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