L’histoire du Val-Benoît s’échelonne sur trois périodes :
1. La période agraire (1224-1789)
Construction d’un prieuré et d’une chapelle en 1224 ; le doyen de Saint-Paul, Othon de Jeneffe, fonde l’abbaye en 1226 et les religieuses cisterciennes de Robermont s’y installaient en 1230. En 1232, acquisition de 50 bonniers (43,5 ha) de bois sur la colline de Cointe, puis acquisition de revenus d’indulgences et de colonies rurales à partir de 1245. L’abbaye et la chapelle s’achèvent en 1265, entourées d’un mur d’enceinte (le site couvre une superficie de 5 bonniers) et une porte est construite à l’endroit de la porterie actuelle, plus une porte plus petite donnant accès à la Meuse.
Des privilèges sont accordés par différents papes : rentes héritables, fermages, l’abbesse cellérière, assistée de gestionnaires, ne peut être traduite en jugement. La communauté est limitée à 45 religieuses en 1330. En 1516, évacuation suite aux débordements de la Meuse ; pillage par le prince d’Orange en 1568. Entre 1516 et 1592, saisies, faillites, nombreux conflits juridiques mais deux abbesses hors du commun : Marguerite de Horion (1569-1597) et Marguerite de Noville (1594-1631) concourent à la restauration immobilière, mobilière et à la reconsolidation financière (reconstruction en style Renaissance mosane en 1629).

Plusieurs inondations et incendies mineurs surviennent pendant le XVIIe siècle mais, au XVIIIe siècle, deux abbesses redonnent éclat et prospérité au Val-Benoît : Anne de Monfort (1725-1749) et Louise de Sarto (1776-1790). Le 18 août 1789, l’ancien régime disparaît et c’est la fin d’un règne et la décadence de l’abbaye.
2. La période industrielle (1797-1927)
Les bâtiments et terrains (40 bonniers – 35 ha) sont vendus au citoyen Pierre Lesoinne en 1797. La ferme Thiernesse (Kinkempois) est acquise par Nicolas Lesoinne en 1797. L’ensemble (90 bonniers) devient propriété de Jules Hauzeur en 1837. La ferme est laissée à l’abandon à partir de 1840 et, en 1841, on construit la gare de Kinkempois et le port de Renory. La ferme est ses dépendances sont cédées à Albert Lamarche qui y fera construire le Château Lamarche ou Petit Val-Benoît. L’église, transformée en scierie, est démolie vers 1810. Le site devient alors industriel : le charbonnage du Val-Benoît, un quai de chargement, un complexe agricole (Van der Heyden). En 1834, installation d’une usine à canons de fusils (John Cockerill) et d’une usine de fonte malléable (Maximilien Lesoinne).
En 1854, l’abbaye est occupée par la veuve de Nicolas Lesoinne, Charles Lesoinne ainsi qu’Édouard Hauteur et son épouse. Laurent Charles Van der Heyden à Hauzeur hérite du Val-Benoît au décès de son épouse, Julie Lesoinne. En 1898, le château devient la propriété de Marie Van der Heyden à Hauzeur, épouse d’Albert Lamarche. De 1854 à 1944 cette demeure est successivement habitée par Adolphe Lesoinne, Éléonore Hauzeur (épouse d’André Roman) et Marie Roman, deuxième épouse d’Albert Lamarche.
3. La période scientifique (1927-2014)
En 1924, l’Université de Liège acquiert l’abbaye avec ses dépendances (superficie : 7 ha), le mobilier restant propriété de la famille Van der Heyden. La nouvelle Faculté des sciences appliquées, dans un style moderniste inspiré de l’Art Déco, est inaugurée le 26 novembre 1937, en présence du roi Léopold III. Les divers instituts s’édifient de 1937 à 1939. Mais le quartier est fortement endommagé par les bombardements du pont du Val-Benoît, en 1944. Les bâtiments universitaires sont reconstruits entre 1952 et 1955 et l’abbaye réédifiée en 1952 en récupérant une partie des matériaux d’origine. La château Lamarche accueille la faculté de géologie jusqu’en 2002.

Les facultés universitaires sont progressivement transférées au Sart-Tilman à partir de 1967 et les derniers étudiants ingénieurs architectes quittent le site en 2006. Le CRM, inauguré en 1964, est démoli de 2013 à 2015. Le site, à l’abandon, est démantelé progressivement. La 4e période est à écrire…
d’après José DELHEZ
- Illustration en tête de l’article : Val-Benoît © Philippe Vienne
![]() |
La CHICC ou Commission Historique et Culturelle de Cointe (Liège, BE) et wallonica.org sont partenaires. Ce texte est le résumé d’une conférence de José DELHEZ, organisée en novembre 2015 par la CHiCC : le voici diffusé dans nos pages. Pour les dates des autres conférences, voyez notre agenda en ligne… |
Plus de CHiCC ?
- CHiCC – Commission Historique et Culturelle de Cointe (Liège, BE)
- HALLEUX : L’industrie à Liège du temps de John Cockerill (CHiCC, 2003)
- DELHEZ : Histoire d’un paradis perdu, le Val-Benoît (Liège) (CHiCC, 2015)
- BIERLAIRE : Erasme de Rotterdam ou l’humaniste dans tous ses états (CHiCC, 2011)
- GILSON : La musique en principauté de Liège au 18e siècle (CHiCC, 2002)
- HOSAY : Grétry, musicien liégeois (CHiCC, 2004)
- VIENNE : Une histoire liégeoise : Georges Nagelmackers et l’Orient Express (CHiCC, 2014)
- FRANSIS : Mes souvenirs d’écolier (CHiCC, 1991)
- MASUY : Historique des espaces verts de Cointe (CHiCC, 2024)
- NOËL : Promenade à travers Cointe et Fragnée de jadis (CHiCC, 1991)
- SEPULCHRE : Les bombardements alliés sur Cointe et ses environs (CHiCC, 1994)